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Rugby : « Il ne faut pas rater le train », prévient le président de l’US Dax Benoît August
Par Julie L’Hostis et Arnauld Bernard
À l’aube de sa deuxième saison en tant que président de l’US Dax, Benoît August a dû gérer la crise du coronavirus et conclure la participation du club à une nouvelle compétition. Un challenge à ne pas manquer.
Après quelques semaines de silence, rendez-vous a finalement été pris avec le président de l’US Dax, Benoît August. Vêtu de noir de pied en cap, l’ancien talonneur, qui attaque sa deuxième saison au poste de président du club où il a commencé sa carrière professionnelle, a abordé tous les sujets avec décontraction et franchise, notamment la création de la Nationale et la participation des Dacquois à ce nouveau challenge sportif.
« Sud Ouest ». Cette Nationale, c’est un projet qui semble sportivement excitant ?
Benoît August. Ça a l’air excitant oui, évidemment.Mais la construction a été pour moi un peu trop rapide. On voit beaucoup dans les journaux qu’on était contre, mais la question était : « Êtes-vous pour la création de cette nouvelle division la saison prochaine ? » Ma position a toujours été de dire que c’est trop tôt et que c’est fait dans l’urgence. Actuellement, les clubs qui y participent n’ont aucune visibilité claire sur les budgets. On a besoin de tout remettre à l’endroit. On n’a pas de n’a pas de date de reprise, on a les Espoirs qui vont suivre et on se rend compte, avec les informations qu’on vient d’avoir, qu’il y a des clubs qui commencent à se poser des questions.
Pendant le confinement, vous aviez confié espérer qu’une nouvelle poule élite déguisée ne fasse pas son retour. Est-ce finalement bien le cas ?
Là, pour le coup, elle n’est pas déguisée ! Avec les autres présidents de Fédérale 1, nous avions en effet voté contre, car nous voulions encore de cette formule pendant deux ans. La bonne nouvelle, pendant le Covid-19, ça avait été que le calendrier des Espoirs soit jumelé avec celui de l’équipe première, parce que ça aurait ramené des gens au stade et c’est toujours bien pour l’unité d’un club. Force est de constater que les Espoirs vont nous suivre en poule élite, enfin en Nationale pardon, mais là, ça n’est plus la même donne. Même sur ce sujet, il reste des interrogations, car il a donc été imposé que les Espoirs soient en Nationale. Sauf que ceux de Narbonne, Albi, Massy et Bourg-en-Bresse jouaient jusqu’à maintenant face à ceux des clubs de Top 14. Cette rétrogradation va vouloir dire que certains jeunes ne vont pas aller dans ces clubs. Ils veulent donc faire une lettre pour demander à ce que ça ne change pas pour eux. Bon, après, on ne peut pas tout avoir…
Est-ce un vrai saut vers l’inconnu ?
Forcément, puisque déjà, il n’y a pas de régionalisme. C’est d’ailleurs plus difficile pour les gens de s’identifier, mais d’après ce qu’on lit, ça sera du haut niveau. Il y a aussi des équipes qui affichent leurs ambitions, ce qui fait que Dax ne fera plus office de favori et d’ogre mais ça pourrait aussi nous aller. Personnellement, je l’ai vécu des deux côtés, à Biarritz, où tout le monde voulait nous battre, et à Dax, quand j’étais minot et qu’on allait gagner contre le Stade Français. Mais quand on t’attend moins et que tu es mort de faim, tu t’en fiches de l’historique du club en face. L’année dernière et celle d’avant, ils s’en fichaient de savoir si Dax avait baissé son budget, si on avait changé les joueurs… De ne pas avoir cette étiquette de favori cette année pourra aussi aider quelques jeunes à progresser encore.
Quel est l’objectif affiché ?
Il est bien entendu de se qualifier. On ne va pas dans cette poule pour jouer les faire-valoir mais pour se qualifier, jouer le plus haut et essayer de monter. La première année va servir d’étalon pour beaucoup de clubs. Et attention, parce que sportivement, ce seront les deux finalistes qui monteront. Mais s’ils n’en ont pas les moyens et qu’ils ne répondent pas au cahier des charges de la LNR, ce seront les deux de Pro D2 qui resteront.
Souhaitez-vous être le premier président qui signe le retour de Dax au niveau professionnel ?
Évidemment qu’on travaille pour ce retour et qu’on en rêve. En attendant, ce qu’on sait, c’est que l’US Dax avait sa place, même peut-être plus que sa place en Fédérale 1. C’est un bon début. Pour l’instant, je l’ai déjà fait monter une fois sur le papier… Puisqu’on monte en Nationale ! (Rires.) Je vais aussi aller taper à la porte pour d’autres subventions. C’est une nouvelle division, alors on peut peut-être prétendre à autre chose. Je ne voudrais surtout pas être le premier président à faire couler le club ! Si on remonte, c’est très bien, mais j’aimerais aussi être le président d’un club qui a une équipe cadets performante, une équipe juniors performante. On a aussi les filles qui viennent de monter et on travaille pour elles. Il faut faire en sorte que l’image du club redevienne ce qu’elle était mais pour ça, il faut gagner !
Concernant le budget allié à cette division – 1,35 million d’euros -, savez-vous comment il sera réparti ?
Le partenariat de la Ligue nationale de rugby (LNR) est à hauteur de 650 000 euros, qui seront consacrés exclusivement aux centres de formation. En revanche, je ne sais pas s’ils seront répartis en fonction du niveau de chaque structure. C’est de toute façon une bonne chose, pour l’USD, je trouve ça très bien. Cela fera une somme entre 35 000 et 45 000 euros, qui sera dédiée au centre de formation et en plus, on aura une aide de la LNR sous forme de consultation sur le marketing, la billetterie, le juridique si on en a besoin.
Quel a été le message des partenaires à propos de cette nouvelle aventure pour le club ?
Tout d’abord, on les a quasiment tous appelés pendant la crise pour prendre des nouvelles. Il n’était pas question de leur demander des sous parce que tout le monde sait comment ça se passe. On a eu à cœur de bien boucler la saison et on reprend attache avec eux autour de cette nouvelle division. Ils sont unanimes sur l’idée de se lancer dans l’aventure, mais aussi sur le fait qu’il ne faut pas faire n’importe quoi, et ils ont raison. On fera avec les moyens que l’on a prévus, si on peut faire un peu plus et trouver d’autres partenaires – parce que c’est une compétition qui va être attractive -, on le fera. Il y a des pistes de nouveaux partenaires mais il n’y a pas d’Émirati, et Christophe Dominici ne viendra pas ! Il faut aussi voir le bon côté des choses, et en ce sens, j’espère qu’on va avoir une vraie négociation avec un télédiffuseur. Pour l’instant, rien n’est signé, mais c’est vrai que ça va changer par rapport à l’année dernière, on va avoir un vrai coup de projecteur sur un seul groupe de 14 clubs. Ça aussi, ça se vend. On aura aussi plus de matchs au stade, tout ça peut être un bien… Quand je dis que c’est trop tôt, je ne dis pas que c’est une mauvaise chose, mais que ça arrive un peu tôt.
Le club avait terminé la saison dernière avec un budget de 2 millions d’euros, . Pensez-vous que ce sera suffisant pour cette saison en Nationale ?
Pour l’instant, on table plutôt sur une baisse de 30 ou 35 % du budget. En étant réaliste, on part là-dessus, tout en se disant que s’il y a des bonnes surprises, et on travaille pour qu’il y en ait, on construira au fur et à mesure. Il faut aussi prendre en compte le fait que l’on pourra recruter jusqu’à fin décembre et qu’on pourra avoir recours aux jokers médicaux, ce qui est important car ça n’existait pas en Fédérale 1. Mais non, nous n’aurons pas 6 millions d’euros de budget l’année prochaine (rires) !
Sur le volet du recrutement, le silence était-il une stratégie ?
Ce n’était pas une stratégie. Mais on ne savait pas s’il allait y avoir un cahier des charges qui empêcherait Dax de participer, donc on ne pouvait pas dire à des joueurs : « oui, oui, on va y être », sans en être sûr. Après, si dans les autres clubs ils veulent annoncer les signatures, pas de problème. Mais j’ai encore vu la semaine dernière l’un d’entre eux annoncer l’arrivée d’un joueur qui n’a finalement pas signé, et ça m’est arrivé aussi. Maintenant qu’on sait qu’on y est, ça va nous permettre d’accrocher d’autres profils, et avec la crise actuelle, le nombre de joueurs de Top 14 et Pro D2 qui ne peuvent pas être gardés est assez impressionnant, donc des opportunités vont peut-être se présenter. En sachant qu’il y aura des premières lignes entières à constituer, un numéro 8 pour nous faire gagner en perforation, et il pourrait y avoir un centre au milieu de terrain, le tout axé sur du haut niveau et de l’expérience. Pour le staff, Stéphane Barbéréna sera toujours là la saison prochaine. Pour le reste, les contrats sont prêts, il n’y a plus qu’à signer (1).
Il faut également un préparateur physique…
Ça sera un des premiers dossiers du staff de le choisir, car c’est un poste très important. Mais c’est finalement la même chose qu’avec les recrues. J’ai énormément travaillé, j’ai beaucoup de contacts, notamment de gens très intéressés pour venir, mais je veux que ce soit des recrues validées par le staff. Je peux vous dire qu’il n’y aura pas 15 arrivées, parce qu’on garde une grosse ossature de l’équipe de l’année dernière, qui était déjà très performante. Le meilleur recrutement commence d’ailleurs par le fait de garder ses meilleurs joueurs, alors on essaie de le faire. Mais ça va très vite arriver et j’espère qu’on pourra très rapidement lancer la saison.
Sur la reprise, avez-vous une idée du calendrier ?
La Nationale commencerait le 13 septembre, avec une reprise début juillet. Cela ferait deux mois et demi de préparation, ce qui sera largement suffisant pour que les joueurs soient en forme. Vis-à-vis du contexte sanitaire, on ne sera pas obligé de faire les tests mais il y aura de toute façon les gestes barrières à respecter. Un médecin suivra l’évolution des choses, et un « agent Covid » sera également présent. C’est une personne qui connaît tous les protocoles à suivre et qui ira dans chaque catégorie pour les expliquer.
(1) D’après nos informations, Arnaud Mignardi et Jack Isaac composeraient le nouveau staff de l’USD. Lire « Sud Ouest » du 3 juin.