Interview d'Arnaud Mignardi :
Nous sommes allés voir du côté des Landes, comment l’US Dacquoise préparait l’échéance Nationale qui débutera mi-septembre. Pour nous parler de cette première saison dans la division intermédiaire entre Pro D2 et Fédérale 1, Arnaud Mignardi, le nouveau coach des lignes arrière nous a livré ses attentes et ses impressions quelques jours après sa nomination. L’ex Briviste arrive dans ce bastion du rugby hexagonal où il forme une certaine « Biarritz connection » avec ses anciens comparses en terre basque ( Jack . Isaac manager, Benoit August Président.). Pour celui qui a arrêté sa carrière de joueur chez le frère ennemi du Stade Montois, il y a de cela quelques semaines, pas le temps de tergiverser dans les regrets ou les remords, avec cette nouvelle orientation professionnelle qui l’attend. A l’image de son ami Arnaud Mêla à Albi, il espère cette reconversion réussi et se fixe déjà des objectifs à l’image du compétiteur qu’il était sur les prés de Top 14 et de Pro D2. Focus sur un guerrier, qui après une carrière de joueur accomplît, compte bien et ce dès cette saison, toucher du doigt les play-offs d’accession au Pro D2.
La carrière se finissant à peine, malheureusement sur un point-virgule avec le coronavirus qui n’a pas permis de terminer la saison en intégralité, vous replonger de suite dans le rugby, dans le haut-niveau et le professionnalisme avec ce nouveau poste à l’US Dacquoise. On dit souvent que, quand quelqu’un arrête, il a besoin de prendre un peu de recul avec le haut-niveau : qu’est-ce qui vous a donné envie de vous y remettre immédiatement ?
Pour commencer, le challenge qu’il y avait avec cette nouvelle poule Nationale et un championnat très relevé avec de grosses équipes. Et puis, pour ma part, j’avais l’opportunité de faire un an de plus à Mont-de-Marsan mais j’ai eu cette occasion et je me suis dit » pourquoi pas maintenant, mieux vaut tard que jamais «. Donc, j’ai dit » feu » et je me suis lancé dans l’aventure.
Quand on regarde un peu l’organigramme de l’US Dacquoise, Benoît August, Isaac, Mignardi, il y a un peu un côté » Biarritz Connection » ?
Un petit peu (rires). J’ai connu Benoît quand j’ai été joueur pendant deux années au BO, on a passé deux années fantastiques et Jack Isaac était notre entraîneur. Donc, l’osmose est parfaite, on s’entendait bien alors, pourquoi pas continuer de la même manière dans le futur ?
Et puis, ça va être des débuts en fanfare avec le super défi de cette Nationale, cette nouvelle division-passerelle entre la Pro D2 et la Fédérale 1 qui ne rassemble que des équipes pros. Il y a un petit air de Pro D2 et un beau challenge pour Dax, j’imagine que ce projet sportif a dû vous mettre en appétit ?
Oui, ça a été une des raisons qui ont fait que j’étais très intéressé pour venir entraîner les 3/4 de Dax. La Nationale est un petit peu la Pro D3, le haut tableau de Nationale se rapprochera vraiment de la fin de classement de Pro D2. Il y a des équipes pros, de très gros déplacements, on va vraiment rentrer dans un championnat plus homogène que sur les dernières saisons où il y avait quand même pas mal de différences. Des petits clubs n’avaient pas trop de budget tandis que d’autres visaient la Pro D2 donc là, le championnat va vraiment se resserrer et ça m’étonnerait qu’il y ait une équipe invaincue durant toute la phase aller.
Benoît August, votre président, a beaucoup hésité ou tergiversé pour savoir si vous alliez ou non en Nationale. Qu’est-ce qui l’a fait hésiter ?
Je ne sais pas, il faudra lui poser la question (rires). Je pense que ce qui l’a fait hésiter, c’est peut-être que c’était un petit peu trop tôt. C’est une poule qui s’est faite très rapidement durant le Covid donc, il fallait trouver très vite un budget, très vite recruter, très vite se mettre en place et ce n’est pas facile pour un club comme Dax qui est en train de se re-structurer. J’imagine que c’est ce qui a fait un petit peu hésiter Benoît.
Quels sont la feuille de route et le cap pour cette année en Nationale ? A quel niveau et à quelle place voudriez-vous vous situer ?
Déjà, c’est de rester dans cette poule Nationale car ce serait une catastrophe si on descendait. L’objectif qu’on s’est fixé entre nous, c’est la qualification et si on atteint les phases finales, ce sera déjà une très belle saison.
Pour Dax, comme pour Albi ou Tarbes, ces anciens bastions, cette Nationale est salutaire parce qu’on voyait que certains clubs comme Auch, qui évoluait à l’époque avec les trois clubs cités précédemment, ont eu des soucis financiers. Là, il y a une Nationale qui arrive avec, apparemment, un financement donc, il était peut-être temps que ces clubs pros arrivent à avoir une division pour eux. Car en Fédérale 1, ils n’avaient pas tous les tenants et les aboutissants pour se structurer et tendre vers la Pro D2 ?
Même en Pro D2, il y a maintenant des clubs avec de très gros budgets donc, il est sûr que de petits budgets comme Dax, Auch et Tarbes avaient un petit peu du mal à suivre. Ce championnat va permettre d’un peu réguler toutes les finances car seuls les clubs qui répondront aux exigences pourront y accéder. Donc, ça sera déjà une sécurité pour pal mal de clubs et ensuite, je trouve que cette Nationale permettra aussi aux jeunes français d’y éclore. Des jeunes qui n’ont pas la chance de pouvoir jouer en Pro D2 ou en Top 14 vont peut-être se rabattre sur ce championnat de Nationale / Pro D3. Ca sera un championnat pro qui peut aussi être un vivier pour le rugby français pour que, justement, de gros clubs viennent chercher des jeunes joueurs français dans cette catégorie.
On sait qu’un de vos anciens coéquipiers entraîne dans une équipe que nous connaissons bien : c’est Arnaud Méla au Sporting Club Albigeois. Lorsque vous acceptez de prendre Dax, est-ce que vous avez échangé avec lui pour prendre un peu le pouls, voir comment ça se passait en Fédérale 1 et en Nationale ? Comme vous, il n’a pas fait de coupure entre sa carrière sportive et sa carrière de manager
Il a fait comme moi, c’est un petit peu un exemple. Dès la fin de sa carrière, il est parti en tant que manager, moi, je ne suis qu’entraineur des 3/4. Mais j’ai échangé avec lui, je lui ai demandé ce qu’il en pensait, s’il pensait que c’était une bonne opportunité ou pas. J’ai un petit peu sondé tout le monde et c’est vrai qu’on m’a dit que le train ne passait qu’une fois donc je me suis dit que c’était le moment de prendre la décision de stopper ma carrière. Ce qui est bien, c’est qu’Arnaud Méla est un ami, j’ai une bonne référence devant moi et je sais que si j’ai besoin, et même s’il est à Albi et qu’on est dans la même poule, ce n’est pas pour ça qu’il ne me répondra pas, bien au contraire. Nous avons échangé sur pas mal de choses et nous échangerons encore. Il restera un proche.
Est-ce que vous avez un regard sur le travail effectué par Arnaud Méla à Albi depuis trois ans ?
Du très bon travail, c’est quelqu’un qui a bossé énormément, qui a changé un petit peu pour restructurer le club d’Albi. Malheureusement, ils ont été maudits pendant deux ans avec notamment une montée volée en quelque sorte par l’arbitre il y a deux ans. Là, ils étaient bien partis, ils étaient premiers nationaux et ce Covid est arrivé, pas de chance pour eux. Maintenant, est-ce qu’ils auront la même chance cette année ? Je ne sais pas parce-que là, vraiment, le championnat National sera très serré. Je suis certain qu’il n’y aura pas de petite équipe, tout le monde va essayer de bien figurer dans cette poule donc, ça sera un championnat plus compliqué que l’an dernier.
Pour vous, où seront les forces en présence dans ce championnat, pour le maintien mais aussi pour l’accession ?
Pour la qualification, je pense que tout le monde le sait, ce sont qui ont fini premiers nationaux cette année : Albi, Massy, Bourgoin, Bourg-en-Bresse. Ce sera vraiment les têtes d’affiche et après, pour vous dire qui descendra, je ne peux pas vous dire. J’espère sincèrement que Dax n’en fera pas partie mais qu’il jouera les troubles-fête. Mais, comme je le dis, ce sera un championnat très homogène et il peut y avoir de grosses surprises.
Dans le staff, vous avez été nommés tard par rapport à la crise du Coronavirus mais tôt par rapport à une temporalité normale. On voit que la première recrue arrive à Dax et justement, on a l’impression que vous êtes le club qui, avec Tarbes, est un peu en retard dans le recrutement qui n’est enclenché que maintenant alors que d’autres clubs ont déjà plié leurs recrutements ?
Nous sommes en retard parce-que nous n’avons pas officialisé toutes les recrues comme tout le monde a pu le faire. Nous aussi, nous avons fait notre marché de notre côté et ça sortira certainement dans les prochains jours.
Si vous avez des noms, nous sommes preneurs
Non, pour l’instant, je ne dis rien (rires).
Par contre, j’ai vu que le premier nom sorti est un talonneur de Biarritz !
Exactement, nous, nous ne prenons que des Biarrots. Si ils ne sont pas en rouge et blanc, on ne prend pas, c’est pour ça (rires).
Vous allez réveiller la rivalité basquo-landaise
C’est une rivalité ancestrale, c’est fini maintenant (rires).
Le recrutement a commencé tard mais on ne doute pas qu’il se fera de façon structurée et cohérente
Par rapport justement à ce coronavirus, il y a beaucoup de joueurs sur le marché donc, il n’y a pas de quoi se précipiter non plus. Il n’y a pas de quoi se jeter corps et âme sur un joueur alors qu’il y en a vraiment de très bons qui sont sur le marché pour venir jouer en Nationale. Même en Pro D2, on voit des super stars qui ont signé à Rouen, à droite à gauche dans des clubs de Pro D2 et certains clubs ont réussi à faire de bons coups. Donc, je pense que Dax sait être patient et flairer la pépite au dernier moment, d’autant plus que la période de mutation n’est pas encore finie.
La seule chose qui va manquer à cette Nationale, c’est le derby avec Tyrosse ?
Oui, je crois que l’an dernier, Tyrosse avait réussi à battre Dax et que Dax attendait sa revanche avec grande impatience. Et puis, il y a eu le virus donc, il n’y aura pas de revanche à moins qu’il n’y ait un petit match amical de prévu entre les deux formations.
Une boucle qui se bouclerait parce-que le premier match qui a été arrêté par le coronavirus a été le match entre Dax et Tyrosse parce qu’il y avait tellement de monde qu’il était sûr d’être annulé alors que les autres étaient encore en suspend. S’il y avait un match amical, on reprendrait quasiment là où s’est arrêté le sport ?
C’est ça, on va normalement jouer contre Tyrosse en amical donc ça sera déjà un petit peu un premier test. Tyrosse est une équipe difficile à gagner, habituée aux joutes de Fédérale donc ça sera un très bon premier test pour nous.
On va terminer par une question un peu décalée : vous nous l’avez dit, vous êtes très ami avec Arnaud Méla. Mais j’imagine que, quand il va venir à Dax ou que vous allez débarquer au Stadium et que comme vous êtes des compétiteurs, les amis seront mis de côté pendant 80 minutes. Est-ce que cela va un peu se brancher sur es deux bancs ?
Je ne sais pas si ça va se brancher (rires). Je ne le pense pas parce-que, déjà, il faut respecter son adversaire et il faut rester humbles autant d’un côté que de l’autre.On ne sait pas de quoi le rugby est fait, on peut très bien mener de 20 points à la mi-temps et repartir la musette pleine. Donc, je pense qu’il faut rester humbles, on se branchera à la fin du match, autour d’une bonne bière et on reparlera du match ensemble.
Maintenant que vous êtes tous les deux passés de l’autre côté de la ligne, vous parlerez comme de vieux guerriers pleins de nostalgie ?
Oui mais il ne faut pas rester dans le passé, on regarde devant. Ce qu’on a fait est fait, maintenant, il y a un nouveau challenge qui nous attend : faire remonter Albi en Pro D2 de son côté et du mien, effectuer de la meilleure des manières ma première saison en tant qu’entraîneur.
Propos recueillis par Loïc Colombié